Voeux 2016 en couples anagrammatiques
En rab, un gag illustrant une faiblesse
prosodique par vers, à savoir dans l'ordre :
hiatus / e caduc sur la césure / e caduc
juste après la césure / e caduc entre
voyelle et consonne (et fausse rime à la césure) //
rime étymologiquement liée / rime entre
féminin et masculin / rime entre singulier et pluriel /
rime pauvre //
absence de césure / treize syllabes / onze syllabes //
cacophonie / faute d'alternance / rime entre è
ouvert et é fermé.
Notez que les voeux ci-dessus contiennent trois de ces
faiblesses !
El Desatinado
(Le Déraisonné)
Je suis le ténébreux, — perdu, — inconsolé,
L'infant d'Aquitaine dont l'arche est abolie :
Ma seule étoile est morte, — mon luth constellé
Porte l'astre de suie de la Mélancolie.
Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et les eaux du Mali,
La fleur qui plaisait tant à mes sens désolés,
Et la treille où la rose au pampre se marie.
Suis-je Amour ou Lusignan ?... Phébus ou Biron ?
Mon front est rouge encore du baiser de la reine ;
Je rêve en la grotte où nage la sirène...
Et j'ai deux fois vainqueur querellé l'Achéron :
Modulant sur la lyre orphique, j'associais
Les soupirs de la sainte et les cris de sorciers.
Rainer Nervaladroit
Quinine sans répétitions
[utilisant pour cela cinq quintuplets
d'homographes, à savoir
(dans l'ordre où ils sont employés ci-dessous) :
• fraise = fruit / on mélange une pâte
avec la paume / collerette / un dentiste utilise sa roulette /
tripes
• laie = espace déboisé dans une
forêt / marteau de tailleur de pierres / laïque
(féminin) / bas du sommier de l'orgue / sanglier
femelle
• masse = grande quantité / gros maillet / on
se rassemble / on frappe verticalement une boule de billard / on
pétrit le corps
• pile = tas / bac où l'on traite la pâte
à papier / exactement / batterie électrique /
volée de coups
• sommes = additions / siestes / être à
la première personne du pluriel / tu mets en demeure /
bête de somme, portant des fardeaux]
Gourmandise à Brocéliande
Aimant la confiture authentique de fraise,
Nous allons dans le bois, en empruntant sa laie,
Chercher ces rouges fruits et les cueillir en masse ;
Puis nous nous unissons et les mettons en pile
Afin de les compter par de savantes sommes.
Reprenant le travail après de petits sommes,
On en fait dans la paume une pâte qu'on fraise,
Ressemblant au papier raffiné dans sa pile.
Comme un tailleur de pierre utilise sa laie,
On l'écrase à la fin d'une pesante masse.
Pour la dégustation, de nouveau l'on se masse,
Mais surgit une soeur demandant qui nous sommes !
D'après ses vêtements, elle doit être laie
Ou châtelaine car elle porte une fraise.
Soudain à côté d'elle un orgue apparaît pile...
Nous restons pétrifiés comme un moteur sans pile,
Sonnés comme au billard une boule qu'on masse,
Torturés par son chant comme une dent qu'on fraise.
Désignant l'instrument, sorcière, tu nous sommes
De nous coucher devant, au niveau de sa laie.
Et nous nous transformons en sanglier, en laie,
Que Circé va punir d'une cuisante pile ;
D'autres deviennent boeufs, ânes, bêtes de sommes...
Si l'ogresse, palpant notre ventre, nous masse,
C'est pour nous dévorer en blanquette la fraise !
[Voir aussi cette sextine autoréférente]
La Camarde métamorphosée en Muse
[quatrain reprenant en boucle les consonnes
phonétiques de « 2016 »]
Dûment, l'ascèse aidant, mes leçons ont dû mal
Inciser de malice aux eaux démolisseuses
De mollassons édits ; mais les saisit Daumal
Assez et demain l'as ose damer l'Osseuse !
Sonnet approximatif tiré
d'un « romans » de Perec (dont
cette phrase a par ailleurs 2016
comme total gématrique) :
Il n'était plus question pour lui d'y retourner.
Pour Elizabeth, c'est tout à fait différent :
Son mari, Charles, est serveur de restaurant.
Ils cherchèrent alors un morceau de papier.
Puis bientôt il se mit à les distribuer.
Mars : Marcel Appenzzell repart à Sumatra,
Caroline Échard rompt avec David Marcia –
Son magasin n'a pas de nom particulier.
Ils furent remplacés par Madame Nochère :
Prends un siège, Cinna, et assieds-toi par terre.
Arrivée de Marcel Appenzzell à Paris.
Je vous y attendrai avec sérénité.
Décembre : séjour des Rorschash à Saint-Moritz,
Et ils n'en étaient pas à une malle près.
Même si vous êtes seul en course, foncez à perdre haleine car il n'y aura qu'un vainqueur :
Gambadez injectif walk-over asphyxique !
[Ce pangramme
alexandrin compte 34 lettres et 4 mots, ce qui n'est pas
un record de concision,
mais c'est curieusement la première fois
que je pense à employer le mot composé
« walk-over »
— alors qu'on ne compte plus les walkmans
& walkyries dans ce domaine.]
Nouveaux proverbes liftés
Boris Vian puis l'Oulipo se sont déjà
penchés sur les généralisations de proverbes
reprenant
leur schéma sonore, « À bon
chat, bon rat » en engendrant une grande
quantité d'autres du type
« À bon ch...,
bon r... », comme « À bon
château, bon râteau ». Prenons ici
l'expression figée
Il ne faut pas être plus royaliste que le roi.
Plusieurs dizaines d'analogues signifient
quasiment la même chose, car les
deux mots sont étymologiquement liés. On peut
tout de même citer l'étrange
Il ne faut pas être plus documentaliste que le document.
(éviter d'être trop humain, donc)
et l'on commence à s'enfoncer dans l'absurde avec
Il ne faut pas être plus rationaliste que la ration.
(on y repensera après le repas)
Mais les dix suivants sortent davantage de l'ordinaire :
Il ne faut pas être plus cabaliste que le cab.
(laissez les postillons y perdre leur salive)
Il ne faut pas être plus dualiste que le dû.
(une dette n'est ni bonne ni mauvaise)
Il ne faut pas être plus fataliste que le fat.
(tout vaniteux imagine que le Destin l'a favorisé)
Il ne faut pas être plus idéaliste que l'ide.
(on ignore souvent la profondeur du poisson rouge)
Il ne faut pas être plus libéraliste que le liber.
(rares sont les cas de symbiose végétale)
Il ne faut pas être plus moraliste que le mor.
(la terre de bruyère est un exemple trop difficile
à suivre pour notre société
décomposée)
Il ne faut pas être plus réaliste que le ré.
(jouez ce que le compositeur a écrit)
Il ne faut pas être plus régaliste que le reg.
(ce désert rocheux reçoit la plus importante
dotation du monarque)
Il ne faut pas être plus trialiste que le tri.
(ranger sa bibliothèque est plus facile qu'une
épreuve de moto-cross)
Il ne faut pas être plus vitaliste que le vit.
(le désir reproducteur va au delà
de l'esprit comme de la matière)
La limite de l'acceptable est sans doute franchie avec
Il ne faut pas être plus analyste que l'an.
(laissez le temps vous ouvrir les yeux)
Il ne faut pas être plus baliste que le B.
(un fort champ magnétique restera toujours
la meilleure catapulte des rayons cosmiques)
Il ne faut pas être plus cardinaliste que Cardin.
(la haute couture soutient la mainmise
de l'église sur l'État —
apparemment pas de lien étymologique
entre les deux noms)
Il ne faut pas être plus carliste que le car.
(cet autobus est bondé de réactionnaires espagnols)
Il ne faut pas être plus diéséliste que le dièse.
(une altération est nécessaire à la combustion du gazole)
Il ne faut pas être plus généraliste que gêner.
(ne pas emmuyer trop de monde à la fois)
Il ne faut pas être plus holiste que le ho !
(un véritable étonnement surpasse toutes les explications)
Il ne faut pas être plus poliste que le Pô.
(ce fleuve italien favorise le développement des nids de guêpes)
P.S. du surlendemain
Devise des bouchers pendant l'occupation :
À tout saignoir, tout au noir.
Après la fête, on gratte sa tête, donc :
Après la foison, on gratte sa toison.
Une fois le calcul effectué, on cherche
de l'argent dans son auto de collection :
Après la fraction, on gratte sa traction.
À la recherche d'antisèches :
Après la frousse, on gratte sa trousse.
Tabagisme passif :
Après le fumeur, on gratte sa tumeur.
Le soupirant est ridicule lorsque
le riche trouve un emploi :
Argent fait rôle et amour mariolle.
Moulure obtenue par démêlage :
C'est en cardant qu'on devient quart-de-rond.
Devise de la pin up égoïste :
C'est en l'aidant qu'on devient laideron.
Devise du morveux timide :
C'est en se mouchant qu'on devient moucheron.
Certains enfants sont des trésors
quand ils arrêtent de jouer :
De l'eau sur la marelle, de l'or dans le panel.
Visite de Gandalf chez les Hobbits :
Jeu de mage, jeu de village.
Les coutumes algériennes sont héritées
de l'Amérique précolombienne :
Jeu de Maya, jeu de wilaya.
Même un grand écrivain est parfois lamentable :
Le style, c'est de l'argile.
J.-H. Rosny aîné envisageait un second tome
sur l'invention de la roue :
Le feu justifie les moyeux.
Marseillais se moquant de ses voisins :
Ni Var ni connard.
Ils le prennent très bien car personne ne se sent concerné :
Ni vexe ni connexe.
Zombie préférant la solitude :
Ni vivant ni connivent.
Fragile comme une plume :
On ne lance pas de piano quand on vit dans une maison de vanneau.
Le mauvais théâtre manque de condiments :
Pièce qui soûle n'agace pas gousse.
(et n'attire pas beaucoup de monde : ... n'affale pas foule)
On ne meurt pas de faim quand le seigneur est généreux :
Point de pingre, point de malingre.
Dégoût pour un mari cacochyme :
Quand vient la glaire, s'en va la mémère.
Un ronflement exagéré est souvent le signe
d'une véritable maladie respiratoire :
Qui chope une ronchopathie chope une bronchopathie.
Devise du chien de combat :
Qui mord mine.
Un plaisantin lésé peut un jour se fâcher :
Qui vole un railleur vole un brailleur.
L'hystérie et la tempête peuvent contribuer
au bonheur conjugal :
Sans Pan et sans vent, l'amour n'est riant.
Le conducteur du fiacre a la même couleur que son cheval :
Tout est bai dans le cocher.
Un loser à Wall Street se sent plus nu
qu'Adam, comme s'il n'avait plus de corps :
Un homme sans argile est un loup sans deal.
Sextine en
anagrimes
[Les mots-rimes sont remplacés par une
anagramme différente à chaque strophe.
Notez que Jacques Jouet avait déjà
proposé cette contrainte dans la
Bibliothèque
Oulipienne n° 65 de 1993. Merci à
Alain Chevrier de me l'avoir rappelé
a posteriori.
Ci-dessous, la difficulté principale vient du
thème imposé et des vers hexasyllabiques.
Le dernier mot est une subtile allusion au « tour
à tour » du
Desdichado original,
si c'est trop obscur.]
El Sextinado
(Le Sextinisé)
Le désespoir m'encra
Et devait me tancer –
Moi qui fus un César,
Sur Bordeaux je régnais –
Mes donjons reniés,
Je vis mourir mon Astre.
L'obscurité resta
Sur ma lyre de nacre
Et sa triste résine
Visqueuse allait créant
L'air qui me résigna
À ces souffrances âcres.
Dans la nuit du sérac,
Des cinéraires âtres,
Offre-moi des regains
De bonheur en mon crâne,
La mer et le nectar
Où la rose s'insère.
Je me sentais serein
Dans les pampres racés
Quand le cafard centra
Sur mon coeur ses ratés :
Que me sauve un écran
Planté de mille graines !
Pourtant qui signera
Pour embrasser les reines ?
Quel regard se cerna
De rouge après leur sacre ?
Lusignan, de quel tarse
Écris-tu ce carnet ?
Comme sur un encart
Aux bordures garnies,
L'exaltation tersa
Mon rêve de sirène
Cherchant à se caser,
M'enchaîner à son ancre.
Tu créas un chant rance
De tarés, qu'on serine,
Qu'on singera cranté.
[Voir aussi ces sextine autoréférente & quinine homographique]
Quatrine holorime
[L'idée d'une citation immuable au 3e
vers est de
Robert Rapilly.
J'ai ici choisi un alexandrin de
Baudelaire.
Les répétitions engendrées
par la quatrine illustrent les difficultés
d'élocution du narrateur.]
Refus d'Alzheimer
Ce radeau téméraire oscillant sans pêcher
Est ma tête anisée, ô mémoire émérite !
Le Ciel, couvercle noir de la grande marmite,
De sous veut n'irriguer son gelé tas léché.
Dessous venir igue et son jeu létal esché
Sera d'ôter mer, air ; aussi l'encens péchait.
Le Ciel, couvercle noir de la grande marmite,
Aima tétaniser haut mais moirer mes rites
Et mater, taniser heaume et moi. Rhème, hérite
De souvenirs, ris gai, songe l'étalé chai !
Le Ciel, couvercle noir de la grande marmite,
Se radotait... Mais raire au silence empêché !
[Voir aussi mon second refus d'Alzheimer]
Anagramme isocèle
Le dernier
Desdichado de
Nicolas Graner est en quadrisyllabes blancs
isocèles, c'est-à-dire dont tous les vers comptent
le même nombre de caractères — sauf
le dernier, auquel il en manque volontairement un. Sa grande
originalité est d'être présenté
comme un taquin 14×14 aux cases
mélangées. En essayant de reconstruire le
poème de Nicolas, je suis tombé par hasard sur
le texte ci-dessous, dont le trou est maintenant situé
à la dixième ligne. Vous pouvez vérifier
qu'il s'agit d'une anagramme, et l'isocélisme vous
convaincra qu'il y a bien le même nombre d'espaces,
c'est-à-dire de cases blanches.
V O L D E G E R F A U T P O R T A N T M I S E R E L E S C A P I T A I N E S F I L E N T B R U T A U X C O N Q U E R I R L O R D U V I E U X J A P O N L O N V A L O S E R M E M E E N G A M I N S M I N U M I N I A I S B L E M E J A I V U █ E N S P U M E L E A U L A B Y M E U N P A N J O Y E U S E S P H E R E H Y A L I N E A U S U D
On peut aussi chercher à ranger le plus possible de cases blanches ensemble. Voici mon record actuel, où les points représentent des cases blanches accolées — les autres servant à séparer les mots. On peut encore vérifier que l'anagramme est correcte.
M A P L U M E M A U V E U L U L A L O E U V R E A U D I E U M I A U L A P O E M E E N P A N N E Q U A D R I S Y L L A B E S C O N V E N T I O N N E L S I N J U S T I F I A B L E S J A R G O N N E R A I E N T D I V E R S I F I E R E N T M O R P H O S Y N T A X E S H Y P E R C O M P L E X E S S U B J U G U E R A I E N T A M I M U . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . █
El Fibonacho
[Tous les mots ont un nombre de lettres
appartenant à la
suite de Fibonacci (1, 2, 3, 5, 8, 13, 21).
C'est une contrainte assez molle, car elle autorise environ
20 % du vocabulaire français — alors qu'un
lipogramme en E n'en permet qu'environ 15 %. Mais ici, tous
les mots ont aussi une somme gématrique appartenant
à cette même suite (1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55,
89, 144, 233). Cette seconde contrainte est au contraire dure,
car elle interdit plus de 98 % du vocabulaire. En combinant
ces deux règles, il reste finalement moins de 0,5 %
du vocabulaire français, donc ça devient assez
monstrueux, surtout que très peu de mots-outils sont
autorisés. Le respect des règles prosodiques est
évidemment une complication supplémentaire.
La plus petite gématrie est 1, pour la
préposition « à »
ou le verbe « a », et la plus
grande serait 233, pour le subjonctif imparfait
« réimperméabilisassiez »
en 21 lettres (mais dans le sonnet je n'ai pas
dépassé 144, pour 13 lettres).
Vous pouvez vérifier ici les sommes
gématriques. Le titre espagnol signifie
« écorchement », donc plutôt
« Désincarnions » si
l'on veut respecter les diverses contraintes, mais j'ai
préféré rester aussi proche que
possible de l'original
de Nerval.]
Desollamiento
(Il désespérerait)
Baronnet à la veine atone, terminée,
La dramatisation m'engluait, m'enlisait :
Ce piano m'éteignit la lanterne ajournée –
La haute Angoisse était ici, rejaillissait.
Ce désarroi scandons à la momie aînée :
Répandez ce pourtour marin latinisé,
La montagne exauçant ce désir, la vinée,
La bombance à cueillir, ce calme éthérisé.
Là refléter Albus Benamour ?... Boniface ?
Effronté, fauve encor à baisoter la grâce,
Mû fabuleusement, rêvai ce bassinet...
Il gagne, à ramer pur, la pïété ravie ;
Il modulera tôt la musicographie :
Ce récit tapageur fringant m'aiguillonnait.
Gueulard Hivernal
Repiquer potentiellement = interpeller poétiquement
[Plusieurs de ces
homographes
ont déjà été utilisés sur
la liste oulipo, y compris à la rime. Ici, les quatorze
mots-rimes sont tous réemployés ailleurs dans le sonnet
— mais sans violer la règle de Boileau mise en exergue.
Bien que les deux sens de « feuilletons » soient de nos
jours sans rapport, ils sont tous les deux issus du mot
« feuillet », donc il vaut mieux éviter de les employer
simultanément à la rime. L'alternance compense un petit
peu la faiblesse des rimes entre verbes au même temps.]
Refus d'Alzheimer II
Ni
qu'un mot déjà mis osât s'y
remontrer — Boileau
Dieux parés de visons, vouliez-vous que j'encrasse
La page où nous passions comme des feuilletons ?
Sautant de leur terrasse ils brisaient nos mentons,
Puis me revirent fiers que sur mer je ramasse.
Nous pensions qu'il faudrait qu'alors je me terrasse
Au fond d'une crevasse à l'instar des ratons,
Dans de sombres prisons sans tambours ni pistons,
Car tous admirent qu'ils craignaient que je crevasse.
Le retraité s'encrasse à compter ses pensions ;
Nous ratons notre vie à freiner nos passions :
Mentons pour que nos ans vers le passé revirent !
Feuilletons la mémoire et le bonheur visons,
Pistons nos souvenirs que les rêveurs admirent :
On y ramasse enfin l'aleph que nous prisons.
[Voir aussi mon premier
refus d'Alzheimer et
mes précédents textes utilisant
des
homographes]
ODS7 et pangrammes
• En
septembre 2006,
Alain Chevrier s'était lancé dans la
pangrammatisation
minimaliste de toute la littérature française,
en s'attaquant d'abord à Mallarmé,
puis Rimbaud, Baudelaire, Roubaud, etc. Mais
il ne semble pas s'être occupé
du Desdichado de Nerval.
Comme l'adjectif kolwézien vient d'entrer dans la
7e édition de l'Officiel du
Scrabble (de janvier 2016), il suffit par exemple de
modifier le deuxième vers en
Le prince kolwézien à la tour abolie :
Alain Chevrier a immédiatement
répondu à cette remarque en proposant
de modifier plutôt le 9e vers qui cite
des noms propres :
Suis-je Amour ou Wozzeck ?... Lusignan ou Biron ?
Le sonnet pangrammatique est alors légèrement
plus long que ma version
kolwézienne, mais elle me semble en effet
encore plus simple !
[Voir aussi cette version ultérieure à distiques pangrammatiques]
• Cet Officiel du Scrabble 7
contient une bonne trentaine de nouveaux mots
a priori prometteurs pour construire des
hétéropangrammes. Mais ils ne
donnent en fait rien de plus que
l'unique solution
de l'ODS5 avec le mot
gwerz,
et la vingtaine de l'ODS6 avec
qwertz
dont un seul
se passe de
l'abréviation vs. On peut bien sûr
quand même construire des pangrammes
de plus de 26 lettres avec les nouveaux mots
de l'ODS7.
• Le genre musical guadeloupéen
gwoka vient par exemple d'y entrer.
Rappelons qu'il ne faut pas trop mélanger les
styles :
Rejetez ce gwoka vif d'ex-bal symphonique !
[alexandrin de 34 lettres, à césure discutable]
Comme souvent, on peut diminuer
le nombre de mots en augmentant
celui des lettres, mais ça devient
plus abscons :
Joviaux, emberlificotez dysphonique gwoka !
[37 lettres]
• Le kwanza, monnaie de l'Angola, est au contraire
dans l'Officiel du Scrabble
depuis des années. À 6 centimes d'euros, cette dame se
dépêche de faire ses courses :
Vif galop : j'y achète ma burqa dix kwanzas !
[33 lettres]
Alain Zalmanski
a immédiatement poursuivi cette histoire
en gagnant une lettre et une syllabe :
La même dame va devoir aller au pressing après
être montée à cheval.
Vif galop, ma burqa j'y tache : dix kwanzas !
[alexandrin de 32 lettres]
P.S. des jours suivants
• Le vin alsacien
edelzwicker est nouveau
dans l'ODS7 :
J'exige un sympathique edelzwicker, vu ? Bof...
[alexandrin de 35 lettres]
• L'anglais
workshop
est maintenant autorisé pour parler d'atelier consacré
à la corrosion :
Magnifique workshop, objectivez l'oxyde !
[alexandrin de 34 lettres]
• Le droit islamique fut-il mal enseigné
au Zaïre ?
Temps du fiqh kolwézien, ce joyeux verbiage.
[alexandrin de 36 lettres]
• À force de chanter, de boire et se droguer,
On vit un chat tout nu perdu sur le glacier
Gwerz, bock, qat : sphynx vu mi-fjeld. [27]
• Vous souvient-il de la fable d'Ésope (oui oui, celui qui
reste ici et se repose) intitulée « Le chat et le coq »,
dans laquelle le félin reproche au gallinacé de beaucoup
trop chanter ? Il enchaînait en effet des improvisations
de jazz et de reggae, en y mêlant aussi maintes musiques
traditionnelles américaines comme bretonnes. Toute cette
histoire tient à vrai dire en juste vingt-sept lettres :
Sphynx vit coq : « Jam, dub, folk, gwerz ! » Sorry, Gef_
• Le jump est une enchère du bridge,
et le whist un ancêtre de ce jeu, donc les trois mots
bridge,
jump et
whist iraient particulièrement
bien ensemble dans un pangramme.
J'ai d'abord obtenu l'énoncé
assez court
Lynx, kifez whist ? Va, coq, bridge jump !
[29 lettres]
mais le fait que les joueurs soient des animaux n'est
pas très cohérent — à moins
d'écrire
une fable dont ce serait la morale. J'ai donc proposé
à quatre oulipotes spécialistes des
pangrammes d'en construire de meilleurs employant ces trois mots,
et voici le feu d'artifice
qu'ils m'ont immédiatement offert, en rebondissant sur
leurs trouvailles successives :
– Jump nickel au whist, vieux bridge.
– Quoi ? Fuyez !
[37 lettres,
Jacques Perry-Salkow]
Bridge (ex-whist), voyez ça : un jump, quel kif !
[décasyllabe de 33 lettres, césuré
6/4, Frédéric Schmitter]
Yankee vif au bridge (ex-whist) claquez jump !
[décasyllabe de 36 lettres, césuré 5/5,
Éric Angelini]
Voyez ça : un jump au bridge (ex-whist), quel kif !
[35 lettres,
Frédéric Schmitter]
Évoquez ce jump funky au bridge (l'ex-whist) !
[dodécasyllabe de 34 lettres,
Éric Angelini]
Zola évoque au bridge (ex-whist) ce jump funky.
[alexandrin de 36 lettres,
Jacques Perry-Salkow]
Ce bridge (l'ex-whist), vainquez-y ! Ô jump, ô kif !
[dodécasyllabe de 34 lettres,
Éric Angelini]
Whist, bridge : jump ! Coq vif oyez klaxon !
[décasyllabe de 31 lettres, classiquement
césuré 4/6,
Patrice Besnard]
J'en ai moi-même obtenu les variantes suivantes
le lendemain, en reprenant
leurs excellents « ex-whist » et exclamation
« kif ! » :
Au bridge (ex-whist), convoquez-y le jump : kif !
[34 lettres]
Au bridge (l'ex-whist), voyez cinq jumps : kif !
[décasyllabe de 33 lettres dont 2 S, césuré 5/5]
Bridgez-y à cinq l'ex-whist : jump vu, ô kif !
[31 lettres]
P.P.S. du 12/02/16, en hommage aux ondes gravitationnelles détectées par l'interféromètre LIGO :
• Trous noirs : rotors
unis / sur torsion
K. Schwarzschild, joyeux : Top, magnifique, bravo !
[alexandrin de 38 lettres dont 2 CHRS]
Révolution sidérale
[Participation à la dernière
sans-culottide du
Sankulipo
de Noël Bernard,
qui a proposé de composer pour l'occasion une
belle absente sur le mot
Révolution.
L'aspect « révolutionnaire »
de mon dizain de décasyllabes
de 333 lettres est précisément de ne
pas évoquer le sens de ce mot auquel
on s'attendait. Vous pouvez
vérifier ici
la belle absente.]
L'outre-ovni
Figé quand l'homme objective une ellipse
Juchant d'aplomb, qu'un si griffu vautour
Subjugue au fond chaque amplifié retour,
D'ahan j'embarque et fugue vers l'éclipse.
Qu'au bord je fiche un temps gravitation ?
Déjà cinq champs forgent l'observation
Jusqu'à l'ogive, humble oeuf pour décennie.
Lorsque vos chants flambent, juge Doppler,
Jupiter flashe, embecque et vend génie...
J'achève et tombe, esquif gris de Kepler.
[Voir aussi les très belles absentes des autres oulipotes]
Morsonnet
[copie d'un message adressé à la
liste oulipo,
rebondissant sur le concept de
sosnet de
Nicolas Graner]
Le poète a très Peur que l'Art quitte son Ode,
Mais croit qu'un Ange ailé Descend vers Lui des airs
Afin d'offrir Un brillant Mot d'esprit, un vers
Scandé fort Bien et pourtant Moins passé de mode.
Alors Il reprend tout du début : l'Auteur Brode
Un sonnet louche Aux termes Courts souvent peu Clairs,
Osant couper Ses lignes Soit en Trois vifs tiers,
Soit en deux moitiés, Sûr qu'au Lecteur sied ce Code.
Cette fureur de rimer Tant va-t-elle Choir
Bientôt, en même temps Que s'Abat l'Aigle Noir
Sur son âme ? Ô vision Sombre d'une des Muses :
« Silence, aède Aux choix contraints, Aux lois pour Fous !
Car je ne permets Pas Que tu blagues, t'Amuses
Avec Mes canons Purs dont Toi-même te Fous. »
Ce sonnet d'alexandrins, dont huit
sont césurés 6/6 et six 4/4/4,
est uniquement composé de monosyllabes
et de dissyllabes (sans
tenir compte des mots élidés de
zéro syllabe). En remplaçant les
premiers par un point, les seconds par un trait,
et les majuscules
par des espaces, on obtient le message
en morse suivant :
.-.. .. .-. .
... .- -. ...
-- .- .-..
-. ..- .-..
- . -..- - .
.-. .- .-. .
-- .- .. ...
...- .. -.. .
--.- ..- .
-.-. . - - .
... .- --. .
-- ..- ... .
...- . ..- -
- .- .. .-. .
Sa transcription en alphabet latin donne :
Lire sans mal nul
texte rare mais vide
que cette sage
muse veut taire
Un tel message crypté ne pouvait se servir
que de mots conduisant à
douze syllabes selon cette règle
(soit environ 0,1 % du vocabulaire
français), et tels qu'une césure
après la 6e soit possible, ou bien
deux après les 4e et 8e. À la
place de « nul », l'adjectif possessif
« son » aurait par exemple
donné une phrase plus naturelle, mais son
code morse ... --- -. ne
permettait pas de telles césures, à l'instar
des SOS de
Nicolas Graner.
Au contraire, il est amusant de noter que
le mot « mot » fournirait un
impeccable alexandrin de dissyllabes
(-- --- -), et que
rien n'interdirait non plus que seules des lexies
monosyllabiques y soient « sises »
(... .. ... . ...).
Avec toujours mes Doux
Et francs saluts pour Vous,
Gefe (--. . ..-. .)
[Voir aussi mon
sonnet en hémioles
de 2003, dont le rythme
est analogue à celui des
sosnets, à
un décalage près]
P.S. du lendemain, en début d'alpharimes
Cette ligne convient Car sa césure Est bonne :
OUI (--- ..- ..)
Pourtant j'aime qu'un vers Sans honte exprès Déconne :
ZUT ! (--.. ..- -)
Comme dans l'Exemple osé qu'ici l'Auteur donne :
NON ? (-. --- -.)
Minet
[Sonnet dont tous les vers suivent le
schéma syllabique donné par le mot
« minet »
en morse, à savoir
-- .. -. . -,
où les points représentent
des monosyllabes, les
traits des dissyllabes, et où les mots
élidés de zéro syllabe sont
oubliés. Il s'agit
d'une autre généralisation du concept de
sosnet inventé par
Nicolas Graner.
Comme pour ses SOS, j'ai ici choisi de ne pas indiquer
les séparations de lettres.]
L'amant fervent en feu comme le sage austère
Aiment d'autant mieux, quand mûrit bien leur saison,
L'assez puissant chat doux, orgueil de la maison,
Restant toujours chez lui, frileux dans son mystère.
L'ami savant des us lascifs et des traités
Cherche tantôt la paix, l'horreur dans les ténèbres ;
L'Érèbe aurait pu prendre alors pour serfs funèbres
D'instruits félins, mais eux n'arquent pas leurs fiertés.
Songeur, prenant la pose après sa noble étude,
Comme quelque grand sphinx perdu dans la quiétude,
Voilà presque qu'il dort baigné d'un rêve enfin ;
Lorsque féconds ses reins luisent de rais magiques,
L'aurore, ainsi qu'un blond sable fait d'or surfin,
Étoile encor ses yeux d'éclats un peu mystiques.
(d'après « Flore du mal »,
Charles beau-fils d'Aupick)
[En ce 80e anniversaire de
Georges Perec,
rappelons au passage sa
célèbre
réécriture lipogrammatique
du même sonnet de Baudelaire]
Morsekus
[Haïkus dont les longueurs des mots
sont imposées par leur titre en morse.
Les fins de vers correspondent ici toujours à
une séparation entre deux lettres,
les autres espaces n'étant pas pris en compte.]
Aimant (.- .. -- .- -. -)
La boussole a peur
Elle palpite et frémit
comme les oiseaux
*
Demain (-.. . -- .- .. -.)
Toute la nuit l'arbre
garde l'espoir qu'au matin
le temps sera doux
*
Gamin (--. .- -- .. -.)
Poisson d'avril cru
et l'enfant rigole encore
de sa bonne blague
*
Givre (--. .. ...- .-. .)
Parfois l'hiver trace
sur ma vitre un blanc dessin
de plumes ou d'anges
*
Grief (--. .-. .. . ..-.)
N'avoir aucun legs
et perdre sa tour ses terres
Je suis l'obscur veuf
*
Ineptie (.. -. . .--. - .. .)
Ce n'est même pas
que ce calcul semble faux
Plutôt qu'il est vide
*
Infime (.. -. ..-. .. -- .)
Ce tout petit ru
qui se jette dans la mer
m'abreuve assez bien
*
Infini (.. -. ..-. .. -. ..)
Le large émeut l'homme
mais ses vastes flots sont trop
salés pour son goût
*
Larme (.-.. .- .-. -- .)
La beauté du ciel
fait pleurer d'un bonheur pur
l'aède enfin sage
*
Libre (.-.. .. -... .-. .)
Il ouvre la porte
de la capsule et s'en va
dans l'espace au loin
*
Livre (.-.. .. ...- .-. .)
Ces pages de sable
sont le monde où nous vivons
Nous sommes des vers
*
Lyre (.-.. -.-- .-. .)
Le poème est court
autant que l'esprit chétif
de l'auteur sans muse
*
Mesure (-- . ... ..- .-. .)
Comment sertir l'art
en un seuil de sept syllabes
ou même de cinq
*
Vivre (...- .. ...- .-. .)
Garde un oeil curieux
Perds-toi dans des lieux nouveaux
et trouve ta voie
P.S. moins sérieux du surlendemain :
Recette (.-. . -.-. . - - .)
L'oeuf mollet doit cuire
noyé d'eau bouillante en gros
quatre milli-jours
*
Graffitis (--. .-. .- ..-. ..-. .. - .. ...)
Devant l'ancien mur
un rebelle un peu simplet
se tâte avec gêne
Vais-je taguer Mors aux dents
Pourquoi pas Nid d'yeux n'y mettre
[tanka]
*
Saperlipopette (... .- .--. . .-. .-.. .. .--. --- .--. . - - .)
Bon sang Fils de catin Porc Mille sabords Diable
Gros tas Ventre-saint-gris Sacré nom d'un chien gueux
Rat crevé morbleu Sot Foutre bordel minable
Pet foireux Vieille peau Nom d'une pipe Dieux
[quatrain d'impeccables alexandrins]
*
Errata (. .-. .-. .- - .-)
Il faut lire -tum
ci-dessus au son final
L'auteur le rata
[Voir aussi ces morsekus queniens]
Morsélénets
[Sélénets
(deux quatrains de pentasyllabes à rimes féminines et
masculines croisées) dont les longueurs des mots sont ici encore
imposées par leur titre en morse. Pour les titres en deux mots,
les fins de vers correspondent à une séparation entre deux lettres,
et le saut de strophe à celle entre les deux mots. Les titres en un
seul mot sont juste compatibles avec une décomposition en huit
pentasyllabes, sans tenir compte des séparations de lettres.]
Bêtisier sinistre (-... . - .. ... .. . .-. / ... .. -. .. ... - .-. .)
Prête-moi ta plume
Pour écrire un mot
Huit vers dans la brume
Car je deviens sot
Ma flamme est bien morte
N'étant plus qu'un vieux
Ouvre à ce cloporte
Pour l'amour des dieux
*
Bluette binaire (-... .-.. ..- . - - . / -... .. -. .- .. .-. .)
Entre dans la danse
La gavotte ample est
Ne perds cette chance
L'agave autant plaît
L'amour va te prendre
Dans son dîner sans
Te soustraire au tendre
Danse ondine et sens
*
Inconsolé (.. -. -.-. --- -. ... --- .-.. ..-..)
Je suis l'infant sombre
Privé de château
Ô morne décombre
D'éden ancien d'eau
J'ai vu la sirène
Franchir l'enfer gris
L'amour de la reine
Vainc soupirs et cris
*
Insignifiance (.. -. ... .. --. -. .. ..-. .. .- -. -.-. .)
S'il nous semble fade
C'est qu'il se sent mal
Craignant l'oral stade
L'auteur n'est que dal
Car en telle rade
Est son art verbal
Qu'une nuit maussade
Va mener son bal
*
Potentialité (.--. --- - . -. - .. .- .-.. .. - ..-..)
Si l'ouvroir existe
C'est afin d'offrir
Une longue liste
D'options à choisir
Pour fuir la routine
Des normes sans feux
Voire en pleine ruine
Viens goûter nos jeux
*
Regrets infinis (.-. . --. .-. . - ... / .. -. ..-. .. -. .. ...)
Au décès sa gloire
Avait beaucoup crû
Mais vite ça foire
L'aède est moins lu
Puis dans l'oubli rentre
Comme un pauvre chien
Ci-gît l'amer chantre
Il n'y a plus rien
*
Statisme inertiel (... - .- - .. ... -- . / .. -. . .-. - .. . .-..)
La Terre est formée
Ses volcans éteints
Puis la mer est née
Courants d'azur teints
Plus de chaude lave
Tout est stable coi
Cette force est grave
Ça gravite eh quoi
Deep Art
En août 2015, trois chercheurs allemands
(L. Gatys, A. Ecker et M. Bethge)
ont développé une technique d'analyse
d'images par réseaux de neurones,
permettant de séparer le « sujet » du
« style ». Leur article est disponible
sur arXiv, mais ils ont surtout
ouvert ensuite le site DeepArt.io où chacun
peut combiner deux tableaux ou photographies
(il faut juste être patient).
Voici deux expériences personnelles avec leur logiciel.
D'abord un exercice
de style presque warholien, où j'ai appliqué
le style de cinq tableaux de Klee
à une photographie de Perec.
Ensuite les deux croisements possibles de la
Pietà d'Avignon avec
une oeuvre de Kandinsky.
Troll
[copie d'un message adressé à la
liste oulipo à minuit pile]
Nous l'avons hélas vu, cette liste contient
trop de gens qui ne font pas un travail patient,
pondant parfois de pauvres vers sans nul suspense,
tantôt restant muets. Et c'est pourquoi je pense
qu'il faudrait se fâcher : aux lois de l'art forçons
les cons !
.--. --- .. ... ... --- -. -.. .----. .- ...- .-. .. .-..
Deux minimalismes panaméens
[En avril 2016, la
liste oulipo a écrit
une grande quantité de parodies de
chansons ou poèmes classiques afin
d'évoquer le scandale des évasions
fiscales à Panama. Nicolas Graner les a compilées
sur son site. Je me
suis contenté pour ma part des trois lignes
ci-dessous, déformant les deux
citations que je connais mentionnant le nom de Panama :
un distique holorime
français de
Daniel Marmié (l'absence de
liaison après « quand » provenant
de l'original) et le très célèbre
palindrome
anglais de
Leigh Mercer.]
Là, quand, à Panama, l'argent y détrempait,
Lacan, à Paname, a l'art gentil d'être en paix.
A man, a popular cash sacral up: O Panama!
Morsonnet II
Fous sur ravins polytonaux
Anton avait confiance : il faut s'inscrire en faux.
L'unique option libre est dans l'action d'une info
Plutôt absurde ou trop bizarre, enfin suivie
D'un langage aussi rare ornant nos sympas vies :
Un cri dans une aria, l'ouvroir qu'Horus envie
En un souple art contraint, d'aucuns huant bravo
Voire un aimable affront, un ultra-vide amphi
Qui grouillait d'outre-aplats parmi montagne ou vaux...
L'ivoire obscur d'un morse, un automne offrant d'arbres
Charmille et l'humide août à glaciaire embrun vif,
Un globe à concave arc pointant un angle actif...
Un scorpion rose accort, câlin, douçâtre, oisif,
Une expo sans toile onc, où s'infiltre en mou marbre
L'amour fatal qu'infirme un chantre au ravi snif...
Cet obscur sonnet d'alexandrins s'inspire du
Faux sursis pour Anton Voyl
composé par
Perec juste avant le 5e
chapitre (manquant) de
la Disparition.
Il code en morse sa 17e ligne, à laquelle j'ai
ajouté un « ou » initial :
ou un fou manchot s'accoudant au balcon du soir
En séparant les lettres par des espaces et les mots
par des barres obliques,
cela donne en morse :
--- ..- / ..- -. / ..-. --- ..- / -- .- -. -.-. .... --- - /
... .----. .- -.-. -.-. --- ..- -.. .- -. - / .- ..- /
-... .- .-.. -.-. --- -. / -.. ..- / ... --- .. .-.
Comme Nicolas Graner, j'ai traduit les points
par des monosyllabes et les traits
par des dissyllabes, sans tenir compte des mots
élidés de zéro syllabe. Et comme
Noël
Bernard, j'ai repéré les séparations
de lettres par des e caducs. Les séparations
de mots sont quant à elles repérées par deux
e de suite, et j'ai choisi d'interdire les
e partout ailleurs, en hommage à la contrainte
de « la Disparition ». Le patron du
sonnet est donc le suivant, en séparant
les hémistiches sur deux colonnes pour
clarifier :
- - -e . . -e e. .
-e - .e e. . - .e -
- -e . . -e e- -e
. -e - .e - . - .e
. . . .e - - - e-e
e. . .e . - - - -
.e . -e - . - .e -
. - .e - - -e . .
-e - . .e . -e - .e
-e e. -e . . -e e- .
. .e . -e . - . .e -
. - .e - - -e -
.e e- . .e . . -e e. . .e
- - -e . .e . - .
Il est très peu probable qu'un énoncé
soit décomposable en 14 alexandrins selon
cette règle syllabique. La citation de Perec que j'ai
choisie, au « ou » initial près,
présente cette rare propriété.
Haïkus triplement holorimes
Le jeune Abram pratiquait un ancêtre
du football dans sa Mésopotamie natale.
Il dut un jour être remplacé sur blessure,
mais le public interpréta ses cris de
douleur comme un poème triomphal.
Il avait appris à Athènes la subtile
technique des débordements le long de la ligne
de touche. Cette fois-là, son bras en écharpe
le condamnait à rester spectateur, mais
il secondait toujours l'arbitre d'un ton solennel quand certains
buts étaient contestés.
P.S. du lendemain,
en versifiant les mises en scène comme
Noël Bernard,
et en essayant la généralisation au
tanka comme Bernard Maréchal
Corrigeons son destin : qu'elle acquière un esprit,
Un terrain nourrissant, une belle apparence !
Toi, choisis un grabat, pauvre voisine rance ;
Mes rongeurs vont trancher ta vie, ils ont compris.
Nous aimons plaisanter quand nous coupons des chênes,
Prétendant que l'azur s'absente ou se déchaîne.
Le baba cool honnit la violence et les chaînes,
Mais sait que dans les arts, la contrainte ne gêne.
Poème rectangulaire
Voici un quintil inédit de
la Chanson du mal-aimé
d'Apollinaire, respectant
comme à son habitude une alternance de
rimes vocaliques & consonantiques
plutôt que masculines & féminines.
J'ai conservé sa ponctuation originale,
bien que l'auteur l'ait supprimée dans toutes
les strophes finalement publiées.
Vois-tu ce tournesol qui naît ?
La néréide ample chantonne
Bilingue août, messe — erreur aînée.
Las ! comment tresse arceaux d'automne
Cornu corps nu damné d'années.
À la manière des poèmes
carrés de l'antiquité (au moins depuis le
IIIe siècle
en Chine, le IVe avec
l'ardhabhrama
en Inde et le
carmen
figuratum en
occident, puis 1997 avec le
diagonnet sur la
liste oulipo &
Internet),
décomposons ce quintil en un rectangle 5×8
de syllabes :
vwa | ty | sə | tuʀ | nə | sɔl | ki | ne |
la | ne | ʀe | i | dɑ̃ | plə | ʃɑ̃t | tɔn |
bi | lɛ̃ | gu | tme | se | ʀœʀ | ɛ | ne |
las | kɔ | mɑ̃ | tʀɛ | saʀ | so | do | tɔn |
kɔʀ | ny | kɔʀ | ny | dan | ne | dan | ne |
+------+------+------+------+------+------+------+------+ | voi | tu | se | tour | ne | sol | ki | né | +------+------+------+------+------+------+------+------+ | la | né | ré | i | dan | ple |chant'| ton' | +------+------+------+------+------+------+------+------+ | bi | lin | gou | tmé | sé | reur | è | né | +------+------+------+------+------+------+------+------+ | las' | ko | man | trè | sar | so | do | ton' | +------+------+------+------+------+------+------+------+ | cor | nu | cor | nu | dan' | né | dan' | né | +------+------+------+------+------+------+------+------+
En le lisant maintenant par colonnes,
on découvre un
sélénet,
analogue nord-africain des negro-spirituals,
entonné au XIXe
siècle durant la colonisation.
Les exégètes contemporains ont
avoué ne pas avoir tout
décodé.
Voile habile à score,
Tunnel inconnu,
Serez goum encore :
Tout rythme étrenne eut.
Ne dansez sardane,
Sol pleureur sonnez !
Qui chantait do d'âne
N'est honnête au nez.
Court pangramme involontaire
trouvé dans
les Mamelles de Tirésias
d'Apollinaire.
Les quatre vers cités comptent en tout 114 lettres,
et le segment pangrammatique en gras seulement 88.
Seriez-vous le coiffeur coupez-moi les cheveux
Les demoiselles de New York
Ne cueillent que les mirabelles
Ne mangent que du jambon d'York
On pourrait même descendre à
70 lettres en supprimant le 3e vers :
Coiffeur coupez-moi les cheveux / Les demoiselles de New York / Ne mangent que du jambon
P.S. des 21 – 24 juin 2016
J'ai aussi repéré dans le
livre d'or du Wiktionnaire
cet extrait de commentaire,
qui constitue un pangramme involontaire de 76
lettres :
[...] fait sur Wikipédia, je tiens à vous apporter un plus concernant le lexique kabyle ou amazigh.
Ça m'a donné envie de reprendre ses mots les plus pangrammogènes.
Puisse le dynamisme ludique d'Internet se lancer
dans les divers monovocalismes possibles :
Blog, Wikipédia, rythmez cinq jeux vifs !
[32 lettres, décasyllabe césuré 5/5]
L'informaticien qui a mis au point un
clavier berbère pour
téléphone mobile s'est-il
exclamé :
Je veux un software kabyle-amazigh qui décape !
[38 lettres]
Je veux que ce software kabyle-amazigh ponde...
[37 lettres]
Je veux ce software kabyle-amazigh qui pend (?)
[36 lettres]
Mais faut-il employer de tels mots
dans les pangrammes ?
Prof, j'évite ce lexique rwandais, kabyle, amazigh.
[40 lettres]
Ce vif lexique rwandais, kabyle, amazigh ? J'opte !
[38 lettres]
J'ai par ailleurs remarqué que le nom complet d'un
journaliste du Monde
permet de placer beaucoup de lettres rares, malgré
une répétition des K
et S. Un jour où il faisait passer un examen,
figurez-vous qu'il reçut une
réclame chinoise par pli urgent :
Michaël Szadkowski, jury, vit fax : pub qing.
[34 lettres, alexandrin]
Le compositeur
Paul Wranitzky était
un chef d'orchestre apprécié de
Beethoven et ses contemporains, mais malgré
leur probable qualité, je
ne vais quand même pas me taper ses 51
symphonies et ses 80 quatuors :
Chef Paul Wranitzky gave bijoux de musique.
[36 lettres]
Si vous préférez, il a surtout
abusé des presto :
Vif, Paul Wranitzky gâcha bijoux de musique.
[36 lettres]
Critique injuste d'un autre
excellent compositeur,
plus récent :
Quel vide projet fugace exhibe Szymanowski ?
[37 lettres]
Paronymes verbaux
Noël Bernard a proposé à la
liste oulipo de reprendre le schéma
« La meilleure façon de..., c'est
de... » récemment employé par un
ministre. J'ai suggéré pour ma part
de se servir de couples de
paronymes, c'est-à-dire ici d'infinitifs ne
différant que par une lettre.
Lettre de cachet :
La meilleure façon d'empoisonner la vie que quelqu'un, c'est de l'emprisonner.
Communisme :
La meilleure façon de rationaliser les dépenses publiques, c'est de tout nationaliser.
Macrocolère costumée :
La meilleure façon de couillonner le peuple, c'est de bouillonner.
Point de vue des manifestants :
La meilleure façon de déboulonner un ministre, c'est de le déboutonner.
Devises du Ministère des Phynances :
La meilleure façon de fonctionner, c'est de ponctionner le contribuable.
La meilleure façon de frictionner un patron, c'est de fractionner ses impôts.
On peut aussi tenter des chaînes
d'infinitifs de ce type
(doublets de Carroll) :
1. La meilleure façon de dérober de l'argent à l'État,
c'est de déroger aux déclarations fiscales.
2. La meilleure façon de déroger à la charité,
c'est de déloger les squatteurs.
3. La meilleure façon de déloger des réfugiés,
c'est de les reloger décemment.
4. La meilleure façon de se reloger,
c'est de ne pas relouer le même taudis.
5. La meilleure façon de relouer une villa,
c'est de renouer avec les précédents locataires.
6. La meilleure façon de renouer avec un ami,
c'est de dénouer ses différends.
7. La meilleure façon de dénouer une intrigue,
c'est de dénoter quelque surprise.
8. La meilleure façon de dénoter un certain courage,
c'est de dépoter une plante carnivore.
9. La meilleure façon de dépoter à mort,
c'est de ne jamais dépiter personne.
10. La meilleure façon de dépiter un professeur,
c'est de débiter des âneries.
11. La meilleure façon de débiter un arbre,
c'est de débuter par son élagage.
12. La meilleure façon de débuter dans une entreprise,
c'est de ne pas rebuter ses collègues.
13. La meilleure façon de rebuter les avances d'un patron,
c'est de se réputer frigide.
14. La meilleure façon de réputer « juste et nécessaire » un projet de loi,
c'est de le répéter sans arrêt.
15. La meilleure façon de répéter une pièce de théâtre,
c'est de repérer ses difficultés bien auparavant.
16. La meilleure façon de repérer une grosse fuite,
c'est d'en réparer une petite.
17. La meilleure façon de réparer un second préjudice,
c'est de repayer la victime.
18. La meilleure façon de ne pas repayer les frais d'agence,
c'est de se relayer comme sous-locataires.
19. La meilleure façon de relayer une rumeur,
c'est de relaver le cerveau des téléspectateurs.
20. La meilleure façon de faire relaver la vaisselle,
c'est d'y relever des détritus.
Alphabet en croix
Auriez-vous mal lu la saga
Obscure de ce vrai microbe
Occitan laissant Max Jacob
Fondre au son de la bodega
Poète audacieux Prince Aga
Versificateur Un oeuf gobe
Ne réagit cet oblong globe
Car alpha ne cherche omega
Du plat il se désintéresse
Les mots jamais juxtaposés
Valent un kopeck trop usés
Qu'on inocule l'allégresse
Sa phrase comme une déesse
Sans airs connus ankylosés
Mais sans borborygmes osés
Deviendra pure prophétesse
Frères enquêtez quantifiez
D'amuïs rayons par l'orage
La genèse d'un gris mirage
La geste que vous étoffiez
Aztèques écoutez l'ouvrage
Car voici l'oral dégivrage
Arawaks qui m'interviewiez
Texte prêt pour la galaxie
Lyre ample dans une abbaye
Zutisme que vous crucifiez
Décomposition
L'inhospitalière
Nuit t'engloutissant
D'une familière
Érosion descend
L'angoissante bière
Te prend innocent
Tu deviens poussière
Ta charogne sent
Toute chair s'effrite
Laissons l'hiver choir
Respectons le rite
De dire au revoir
Pas la moindre fuite
N'est possible Ô noir
Vernis car trop vite
Ces vers vont te seoir
Bauderlaine
[Ce double
sélénet
illustre toutes les décompositions
possibles d'un vers pentasyllabique en mots d'une à
cinq
syllabes, les mots élidés de zéro syllabe ne
comptant pas :
5 / 1+4 / 2+3 / 3+2
4+1 / 1+1+3 / 1+2+2 / 1+3+1
2+1+2 / 2+2+1 / 3+1+1 / 1+1+1+2
1+1+2+1 / 1+2+1+1 / 2+1+1+1 / 1+1+1+1+1
Désolé pour le thème lugubre,
mais c'était assez naturel
avec une telle « décomposition ».
Si vous préférez, j'avais
autrefois traité le
thème opposé
de l'agglutination.]
[Voir aussi ce
sonnet
de Robert Rapilly, ainsi que son
précédent
onzain, qui a inspiré
ma décomposition ci-dessus]
Division cellulaire
Infinitésimalement
L'enfant s'individualise
L'invention particularise
L'itinéraire enthousiasmant
Expérimentons hardiment
L'anticonformiste surprise
Prouvons notre débrouillardise
Afin d'aiguiser l'agrément
Chaque divisible cellule
Sûrement toujours véhicule
Certaines nouveautés pardi
Qu'illumine durant quatorze
Siècles l'ardent roman ourdi
[Toutes les décompositions possibles
d'un vers
octosyllabique en mots de deux à huit syllabes
8 / 2+6 / 3+5 / 4+4
5+3 / 6+2 / 2+2+4 / 2+3+3
2+4+2 / 3+2+3 / 3+3+2
4+2+2 / 2+2+2+2]
Composition
[copie d'un message adressé à la
liste oulipo]
Les décompositions
d'entiers explorées récemment
(qui s'appellent juste
compositions en mathématiques)
peuvent aussi donner des règles de compositions
oumupiennes
minimalistes. Ça se rapproche un peu de
Tom Johnson du point de vue conceptuel, car
la formulation de la règle ne prend que deux lignes mais
l'« oeuvre » peut durer autant qu'on le veut.
Je vous propose ci-dessous cette règle :
Décomposer une mesure à quatre temps de toutes
les façons possibles en notes allant de la croche à
la ronde.
Il est évidemment possible de choisir d'autres mesures et
de subdiviser encore davantage. Les deux minutes ci-dessous
passeraient par exemple à 9 heures d'écoute si
l'on atteignait les doubles croches, à 68 ans avec
les triples croches, et à 21 fois l'âge de
l'Univers avec les quadruples croches !
J'avoue ignorer si Tom Johnson l'a déjà fait ou
non. J'ai l'impression qu'il se concentre davantage sur les
hauteurs des notes que sur leurs durées.
Je me souviens en revanche que
Messiaen avait
généralisé aux rythmes les
règles de composition dodécaphoniques.
Dans l'enregistrement ci-dessous, j'ai choisi
un ordre des mesures allant approximativement
des plus « calmes » aux plus
« dynamiques ». Ça commence par
exemple par la ronde (notée 8 car elle dure autant que
8 croches), puis deux blanches (4 4), puis les
autres mesures à deux notes avec en premier les moins
syncopées (6 2 et 2 6), ensuite les bancales
(5 3 et 3 5) et enfin les très
dissymétriques (7 1 et 1 7), et j'ai
continué de façon similaire avec les mesures
à 3 notes, puis 4, 5, 6, 7 et 8 notes.
J'ai même failli raffiner en classant par exemple
la syncopée « 2 4 2 »
après la très carrée
« 2 2 4 », mais j'ai
finalement conservé l'ordre assez naturel
de ces 128 mesures :
8 |
4 4 |
6 2 |
2 6 |
5 3 |
3 5 |
7 1 |
1 7 |
4 2 2 |
2 4 2 |
2 2 4 |
4 3 1 |
4 1 3 |
3 1 4 |
1 3 4 |
6 1 1 |
1 1 6 |
5 1 2 |
1 5 2 |
2 5 1 |
2 1 5 |
5 2 1 |
1 2 5 |
3 2 3 |
2 3 3 |
3 3 2 |
3 4 1 |
1 4 3 |
1 6 1 |
2 2 2 2 |
4 2 1 1 |
4 1 2 1 |
4 1 1 2 |
2 1 1 4 |
1 2 1 4 |
1 1 2 4 |
2 2 3 1 |
2 2 1 3 |
3 1 2 2 |
1 3 2 2 |
3 1 3 1 |
3 1 1 3 |
1 3 3 1 |
1 3 1 3 |
2 4 1 1 |
1 1 4 2 |
3 3 1 1 |
1 1 3 3 |
5 1 1 1 |
1 5 1 1 |
1 1 5 1 |
1 1 1 5 |
3 2 2 1 |
3 2 1 2 |
2 3 2 1 |
2 3 1 2 |
2 1 3 2 |
1 2 3 2 |
2 1 2 3 |
1 2 2 3 |
2 1 4 1 |
1 4 2 1 |
1 4 1 2 |
1 2 4 1 |
4 1 1 1 1 |
1 1 1 1 4 |
2 2 2 1 1 |
2 2 1 2 1 |
2 2 1 1 2 |
2 1 1 2 2 |
1 2 1 2 2 |
1 1 2 2 2 |
3 1 2 1 1 |
3 1 1 2 1 |
3 1 1 1 2 |
1 3 2 1 1 |
1 3 1 2 1 |
1 3 1 1 2 |
2 1 1 3 1 |
1 2 1 3 1 |
1 1 2 3 1 |
2 1 1 1 3 |
1 2 1 1 3 |
1 1 2 1 3 |
3 2 1 1 1 |
2 3 1 1 1 |
1 1 1 3 2 |
1 1 1 2 3 |
2 1 3 1 1 |
2 1 2 2 1 |
2 1 2 1 2 |
1 4 1 1 1 |
1 2 3 1 1 |
1 2 2 2 1 |
1 2 2 1 2 |
1 1 4 1 1 |
1 1 3 2 1 |
1 1 3 1 2 |
1 1 1 4 1 |
2 2 1 1 1 1 |
1 1 1 1 2 2 |
3 1 1 1 1 1 |
1 3 1 1 1 1 |
1 1 1 1 3 1 |
1 1 1 1 1 3 |
2 1 2 1 1 1 |
2 1 1 2 1 1 |
2 1 1 1 2 1 |
2 1 1 1 1 2 |
1 2 2 1 1 1 |
1 2 1 2 1 1 |
1 2 1 1 2 1 |
1 2 1 1 1 2 |
1 1 3 1 1 1 |
1 1 2 2 1 1 |
1 1 2 1 2 1 |
1 1 2 1 1 2 |
1 1 1 3 1 1 |
1 1 1 2 2 1 |
1 1 1 2 1 2 |
2 1 1 1 1 1 1 |
1 2 1 1 1 1 1 |
1 1 2 1 1 1 1 |
1 1 1 2 1 1 1 |
1 1 1 1 2 1 1 |
1 1 1 1 1 2 1 |
1 1 1 1 1 1 2 |
1 1 1 1 1 1 1 1 ||
En plus de leurs durées différentes, j'ai
décidé d'associer une note à chaque
chiffre : do pour la ronde (8), do# pour la blanche
doublement pointée (7), ré pour la blanche
pointée (6), ..., jusqu'à sol pour la croche (1).
Cliquez sur cette image pour afficher la
partition
complète au format PDF (54 Ko) :
Pour repérer les mesures, j'ai aussi ajouté
à chacune un do ronde dans le grave.
Et voilà ce que ce
procédé automatique engendre (130 Ko)
Avec beaucoup d'indulgence, on pourrait ressentir une saturation phynale à la Ligeti, mais c'est quand même assez insupportable, non ? ;-)
La superposition en
canon de ce même schéma rythmique donne un
résultat plus dansant (178 Ko)
P.S. du 14/04/17
Pour illustrer que ces 128 rythmes pourraient donner des oeuvres
plus intéressantes que mes premiers exemples minimalistes,
je les ai réordonnés afin d'imiter le début
de l'opéra
Boris Godounov de
Moussorgski
— connu pour la variété rythmique de ses
mélodies. Comme l'orchestration n'est ici pas
conservée, il est difficile de reconnaître les
dialogues de la fin, qui changent constamment de tonalité.
En revanche, le tout début est très proche de
l'original, à de menues simplifications ou complications
près qui ont été nécessaires pour
respecter la contrainte.
Cliquez sur cette image pour afficher la
partition
complète au format PDF (78 Ko) :
Les numéros indiqués au dessus de chaque mesure
correspondent à l'ordre de mon premier exemple minimaliste
(qui n'est pas le plus logique, mais c'est pour avoir une
référence). Les silences sont
considérés comme des cas particuliers de notes,
mais leur durée totale doit correspondre à une
seule note de la « composition » ; par
exemple, une demi-pause (de deux temps) doit correspondre
à une blanche dans les mesures de mon premier exemple,
et jamais à deux noires.
En voici un
enregistrement volontairement
étrange (fichier MP3 de de 2,6 Mo), utilisant
le son d'un erhu, instrument chinois millénaire.
[Voir aussi mes autres expériences oumupiennes]
Composition holorime
[deux
sélénets
holorimes illustrant de nouveau
toutes les décompositions
possibles d'un vers pentasyllabique en mots
d'une à cinq syllabes :
5 / 1+4 / 2+3 / 3+2
4+1 / 1+1+3 / 1+2+2 / 1+3+1
2+1+2 / 2+2+1 / 3+1+1 / 1+1+1+2
1+1+2+1 / 1+2+1+1 / 2+1+1+1 / 1+1+1+1+1]
Marceline, que le rêveur Jean de la Lune surnommait amoureusement Éva, était bien volage. Mais elle savait désarmer toute critique en combinant ses plus beaux atours à des airs de sainte nitouche. Faussement naïf, le poète finit par conquérir la belle en prétendant qu'au cours de sa longue attente, aucune vilenie n'avait jamais entaché sa bonne fortune.
Passementeries
Des matelassiers
Passent menteries,
Démâtent l'acier.
L'hérétique nuque
A pris, l'arrangeant,
L'air éthique eunuque ;
Âpre, hilarant Jean !
L'Éva si frivole
Aimant s'enter moins,
L'évasif rit, vole
Et ment sans témoins :
Plus ma douce geste
Gêne, infâme onc heur
Pluma — d'où ce geste :
J'ai nymphe à mon coeur.
Holomorse
[Distiques d'alexandrins holorimes dont
les longueurs de mots sont imposées
par la transcription en morse de leur titre.
Cela combine donc la contrainte
du morse explorée depuis mars
dernier (après le premier
sosnet de
Nicolas
Graner le 17 février)
et celle des holorimes à longueurs
de mots imposées
(lancée par Robert Rapilly le
8 juin). Mon troisième distique
fait allusion à
l'heure très tardive à laquelle j'ai
tenté ces premiers exemples !]
Poésie (.--. --- ..-.. ... .. .)
Lève, Éros, ailes qu'aux lettrés forgeas, secret !
Les vers haussaient le col et très fort jà se créent.
*
Étrange (..-.. - .-. .- -. --. .)
Cherche, ô bizarre et tors lettré, non Queneau franc,
Cher showbiz, arrête ! Or, l'étrenne oncques n'offre ans.
*
Aspirine (.- ... .--. .. .-. .. -. .)
Sens l'huileux jus laid, prends ce sale remède ouï !
Sans lui, le julep rance, euh ça, l'heure m'aide, oui...