Proverbes paronymiques
[Nicolas Graner a
relancé le procédé consistant à ne modifier
qu'une seule lettre d'un proverbe, comme Jean Fontaine l'avait
remarquablement illustré en 2001. Nicolas
propose cette fois de les introduire par un distique. Voici la
série minimaliste que j'ai tentée pour participer, déformant dix
fois le même original. La première version †
date en fait de mon enfance, dans les années 1970, la
seconde ‡ est l'une des trouvailles de Jean
Fontaine en 2001, et les six dernières emploient n
métagrammes simultanés (n).
J'y ai ajouté le lendemain un autre jeu de mots de mon
enfance †, déjà cité dans
cette fausse définition
de 1998, et si naturel qu'il a en fait été plusieurs fois
réinventé par diverses personnes. Il supprime deux lettres à
l'original au lieu d'en substituer. La seule nouveauté ci-dessous
est son distique holorime d'introduction.]
Étoile et Terre séparées
Par simples forces de marées
Le soleil fuit pour tout le monde †
La canicule / est ridicule
Le soleil cuit pour tout le monde ‡
Notre Galaxie eut envie
De produire un astre de vie
Le soleil, lait pour tout le monde
Nerval prend dans son désespoir
Son étoile pour un trou noir
Le soleil, nuit pour tout le monde
Phébus hâté / cause l'été
Le soleil luit pour août, le mande (2)
Par ce lit artificiel vais-je
Comme vous, depuis la Norvège ?
De Soleim, duit pour tout le monde (3)
Apollon fait bénéficier
De son talent de pâtissier
Le soleil cuit four, goût le fonde (4)
Hélios tourne autour de la Terre
Avec un immuable horaire
Le soleil suit jour : tour de ronde (5)
Observons à la loupe autant
De parasites mijotant
Hé ! soleil huit poux bout — je sonde (6)
Ce jeune basané détale
Lorsque la police s'installe
Là Soheïl fuit : peur fout ce condé (7)
Le pire homme à nommer sapeur est — parlez, sots ! —
Le pyromane, ô mess apeuré par les seaux :
Qui trop embrase mal éteint †
El Desaparejado
[Tronquer ce poème après n'importe quelle strophe donne un
hog roubaldien,
mais ça n'en est jamais un si l'on coupe ailleurs.
Il s'agit donc d'une extension des
togs irréductibles,
mais avec trois coupures au lieu d'une.]
Ma tour plie
J'ai frôlé
Un soleil noir de Folie
Ombre qui m'as consolé
Rends-moi la mer d'Italie
La fleur dont j'ai raffolé
Et le pampre qui s'allie
Au giron
De la reine
J'ai rêvé de la sirène
Puis traversé l'Achéron
Où la fée
Crie Orphée
Aelindiviseurs de digrammes
[Léopold Julia a
transmis & illustré sur la
liste oulipo une contrainte
d'Anthony Etherin, cousine de ses
« aelindromes » que nous avions un peu explorés en français
début 2019 : un texte est
ici encore décomposé en blocs de différentes tailles, mais au
lieu d'en inverser l'ordre en les conservant tels quels, Etherin
en prend maintenant les anacycliques (inversions littérales)
en les gardant dans leur ordre initial. Autrement dit, ses
« aelindiviseurs » peuvent être considérés comme des anacycliques
littéraux d'aelindromes. Ci-dessous, j'ai commencé l'exploration
minimaliste des « aelindiviseurs de digrammes » en français :
on inverse l'ordre de toutes les paires de lettres successives
pour obtenir la seconde partie du texte. Schématiquement, une
chaîne de caractères ABcdEFghIJ... devient donc BAdcFEhgJI...
Cette contrainte avait en fait été plagiée par anticipation
en 2015 dans cet
homovocaloconsonantisme,
très dure contrainte dans laquelle les consonnes et les voyelles
étaient indépendamment conservées dans l'ordre, mais décalées
les unes par rapport aux autres pour obtenir la seconde moitié
de l'énoncé.]
L'imam
purifia nos petits instruments à vent :
coranisa ocarinas.
[Chaque mot alterne ici consonne & voyelle
(rigidité de l'okapi), donc ce premier
exemple respecte la contrainte
homovocaloconsonantique
de 2015. J'indique juste « okapi » dans la suite lorsque
c'est de nouveau le cas.]
Plaisanter chez les pauvres :
amuser masure.
[okapi]
Patiner une sculpture :
ambrer marbre.
Bolsonaro face à la pandémie :
alitons latinos !
[Notez qu'il reste ici une lettre finale
isolée, donc non décalée.]
La mauvaise nourriture rend folle la princesse captive :
La raison se tirait en anti-asilé
À l'Arsinoé, si tartine naît salie.
[Tentative en alexandrins blancs. De nouveau, il reste
une lettre finale isolée, donc non décalée.]
Éternelle flûte des montagnes :
an pyrénéen,
nay pérenne.
Quand nous apercevons ces surfaces multicolores, ces ares irisés,
toute colère s'étiole, et notre joie s'exprime facilement :
ire rassise,
rires aisés.
Une fois le poisson lune localisé, la môle sise,
nous lui offrons de la chair de chien de mer,
d'émissole, ou plus souvent de limande sans arêtes :
sole mise,
os élimés.
[okapi]
Voici votre avenir lu : au lieu d'un ivre alun ou d'un vil urane,
l'eau de vaisselle deviendra à la mode pour faire briller le métal.
Lavure in,
alu verni.
Ce thon morose demande plus d'eau :
Mare, je me retire ! Bonite
amère, je mérite robinet.
[okapi]
Ivresse de l'écriture à contraintes matheuses :
Légo de numéro et gnôles,
Éloge d'une mort en glose.
Choix du clinamen comme libération :
Et un penaud poète hérissé,
Tenu, épandu, opte hérésies.
P.S. du 28/06/22 : Dans ses propres aelindromes & aelindiviseurs, Anthony Etherin va au delà des simples digrammes. Il décompose en effet un premier texte en blocs de tailles correspondant aux décimales successives d'un nombre célèbre, par exemple π, et obtient un second texte en inversant l'ordre de ces blocs (aelindromes) ou bien l'ordre des lettres au sein des blocs (aelindiviseurs). Les six premiers chiffres de π = 3,14159... découpent par exemple l'expression « Cachette à numéro rémunéré » en cac/h/ette/a/numer/oremunere, et en inversant les lettres de chaque bloc, cela devient cac/h/ette/a/remun/erenumero, soit presque la même chose : « Cachette à rémunéré numéro ». Comme Léopold Julia le 24/06/22, j'ai ci-dessous illustré les vingt-six premiers chiffres de π = 3,1415926535897932384626433... Le texte est introduit par un sélénet, comme pour mes palindromes-express de 2018, et vous pouvez encore passer votre souris sur le texte pour afficher les blocs symétriques sur fond coloré.
Le grand astronome
Songe que la nuit
Est un métronome
Dont l'algèbre luit
Son moteur consomme
L'or noir que produit
Notre Terre et somme
Ses tours de circuit
Moralité : Nombre, tu iras égaler nos IA exagérées, à peine velléitaires néo-sagas, noires salinières, fit le docte phare d'Arago. Morigène ta mer noire, nuage tel ! Mon but érige sa raison relaxée : ère gaie, pas vénielle en sériations, à gasoil assertif. Serein delco pétaradera : homogène giration, rémunéré galet. |
nom/b/retu/i/raseg/alernosia/ex/ageree/ sapei/nev/ellei/tairesne/osagasnoi/ ressali/nieresfit/led/oc/tep/haredara/ gomo/rigene/ta/mernoi/renu/age/tel mon/b/uter/i/gesar/aisonrela/xe/eerega/ iepas/ven/ielle/enseriat/ionsagaso/ ilasser/tifserein/del/co/pet/araderah/ omog/enegir/at/ionrem/uner/ega/let |
P.P.S. du 02/07/22 : palindrome-express
Puissent les navettes
Poncer nos soucis,
Faucher pâquerettes,
Ô seul Médicis !
Moralité :
Rase
cet
inutile
tracas, satellite !
Et
il
le
tassa, car
t'élit
unité, César.
P.3S. du 03/07/22 :
aelindrome selon les treize premiers chiffres de
π = 3,141592653589..., puis dans l'ordre inverse 853562951413.
Un subtil mélange
De chiffres est né.
Ô Seigneur, arrange
Cet ordre enchaîné.
Moralité : Dieu, ô ce tri ! N'altérez le nombre qui lie ! Vous ôterez erreurs, phénomène encreur. Sphère zérotée, vous équilibrerez le nominal troc étudié. |
die/u/ocet/r/inalt/erezlenom/br/equili/evous/ ote/rezer/reursphe/nomeneenc/reursphe/rezer/ote/ evous/equili/br/erezlenom/inalt/r/ocet/u/die |
P.4S. du 04/07/22 :
aelindrome selon les treize premiers chiffres de
e = 2,718281828459..., puis dans l'ordre inverse 548281828172.
En l'effervescence
D'espérés péchés,
Rends cette sentence
Brève d'évêchés :
Représente l'esche
De l'excès des sens ;
Respecte ce prêche,
Tes chefs et le cens.
Sentence : Des errements, et en ce jerk rêvé, réémets verbe, sèche ex-prédelle brevetée et célébrée de lèche, exprès mets ver (berk !), révère jet-set encenser remède. |
de/serreme/n/tsetence/je/rkrevere/e/metsverb/es/ echeexpr/edel/lebre/veteeetce/lebre/edel/echeexpr/ es/metsverb/e/rkrevere/je/tsetence/n/serreme/de |
cens : dénombrement ou redevance
prédelle : partie inférieure d'un retable
P.5S.
du 06/07/22, pour l'anniversaire de
Rémi Schulz :
aelindrome selon les quatorze
premiers chiffres du nombre d'or φ = 1,6180339887498...,
puis dans l'ordre inverse
9478893308161, où le chiffre 0 est représenté
par un groupe de 10 lettres.
Quand l'auteur est ivre,
Il ruine son coeur,
Offrant mieux que cuivre
À chaque lecteur.
Le pays du livre
A tant de bienfaits !
Quand on s'en délivre,
On perd ses effets.
Moralité : Où noce Balzac, l'âme gire mi-schuss : anéantie, la bonté du pote à sac ! Qui tombe de l'école lit l'or. Alice ensevelit l'orale colombe — de là s'acquitte du potentiel abonné. Assagi, Rémi Schulz a clamé au nocebo. |
o/unoceb/a/lzaclame/giremischu/ssa/nea/ ntielabon/tedupote/asacquit/ombedel/ ecol/elitloral/iceensev/elitloral/ecol/ ombedel/asacquit/tedupote/ntielabon/ nea/ssa/giremischu/lzaclame/a/unoceb/o |
Hog irréductible
[Le hog irréductible a
récemment été défini comme un hog
qui n'est pas un tog : supprimer des vers de la fin donne
toujours un total de syllabes et/ou de vers qui est composé (non
premier). Ci-dessous, le hog complet compte 37 vers de 3 ou 7
syllabes, et totalise 163 syllabes — nombre apprécié des matheux
car la constante de Ramanujan eπ√163 est presque
un entier, avec une erreur de moins de 0,000000000001.
L'alexandrin classique
« La mort tranche le fil de nos fâcheux travaux » est
cité en acrostiche.]
Le poème
A pour thème
Mon chantier,
OEuvre entier.
Rien ne brise
Ta surprise
Tant que la rime instamment
Récidive,
Attentive,
Naviguant au firmament
Comme un brillant dïamant.
Hémistiches
Et postiches
Lasseront
En leur prompt
Formatage
Issu d'âge
Légalement périmé,
Donc à présent supprimé.
Encourage
Notre rage,
O perturbé liseron,
Si l'épreuve
Fait peau neuve
Avec nos coups d'éperon !
Ca délire
Hélas, lyre :
En ce borgnon méridien,
Un céphalo-rachidien
Xylophone
Te siphonne
Rythmiquement la raison
Avant la péroraison.
Vivisecte,
Architecte,
Un profil cassé que seul
Xenakis laisse au linceul.
[Voir aussi ces métatog, architog et tog à trois coupures, dont les rythmes sont similaires bien que les contraintes numériques diffèrent]
Double codage simultané
[Rémi Schulz a
proposé et
illustré une fort difficile
combinaison de deux contraintes : un même énoncé
doit coder deux mots différents selon la
1-sympathie stricte
et en calculant l'écart alphabétique entre les première
& dernière lettre de chaque mot — cette différence
donnant la valeur gématrique des lettres successivement
codées. Voici trois noms propres que j'ai essayés.]
Gay
cérébral griot chante hui creux noir.
[La 1-sympathie stricte code « Arthur »,
et la gématrie relative entre première & dernière
lettre de chaque mot donne 18-9-13-2-1-21-4, c.-à-d.
« Rimbaud ».]
Arts-drogue
combinons, valable record futur testons !
[La 1-sympathie stricte code « Robert »,
et la gématrie relative entre première & dernière
lettre de chaque mot donne 18-1-16-9-12-12-25, c.-à-d.
« Rapilly ».]
Magma,
vertige : papyrus lança signe, drôle art.
[La gématrie relative entre première & dernière lettre
de chaque mot donne 14-9-3-15-12-1-19, c.-à-d. « Nicolas »,
et la 1-sympathie stricte code
« Graner ».]
Protéacrostiche
[Robert Rapilly a
proposé
et
illustré le redécoupage de
lignes isocèles
selon plusieurs longueurs, comme dans les
protéonets,
la nouveauté étant que chaque présentation doit fournir un
acrostiche différent. Voici l'hommage que je lui ai rendu.]
Respirant pour produire art
Ou splendeur il est peinard
Barde à séduire inclassable
Et pas laid livre sculptant
Retable loué quand pourtant
Têt y voit l'inconnaissable
Respirant pour produire
Art ou splendeur il est
Peinard barde à séduire
Inclassable et pas laid
Livre sculptant retable
Loué quand pourtant têt
Y voit l'inconnaissable
[Voir aussi cet antécédent en prose]
Anagramme trilingue
[Anthony Etherin et
Pedro Poitevin
ont composé
deux
sonnets en anglais et en espagnol,
qui sont à la fois des traductions approximatives
et des anagrammes l'un de l'autre. En voici une
animation
postée sur Twitter (et transmise à la
liste oulipo par
Alexandre Carret).
Comme j'avais autrefois déjà expérimenté sans trop de mal
les
anagrammes
globales, même
versifiées,
j'ai tenté ci-dessous une traduction française de leur sonnet.
Hélas, il contient beaucoup trop de A & O, donc j'ai dû me
résoudre à les accumuler dans un titre, appel désespéré à
Ada Lovelace — fille de
lord Byron et première
programmeuse sur la machine analytique de
Charles Babbage.]
Ô dosage, ôôôôô Adaaaaaaaaaaaaaaa !
Durant des mois, nous avons permuté
Tout meuble, optant pour la place correcte.
On a biffé, bagarré, discuté
En balayant les fautes que j'injecte.
Dans la maison, sais-tu de quel côté
Loger le lit de papy l'architecte,
Ou ce rideau de royale beauté ?
L'amaryllis flamboyant s'y délecte.
Dans notre vie aussi nous recherchons
Où mettre enfin notre âme qui titube.
Homologuons des boomerangs ronchons ;
L'ellipsoïde est-il vu comme un cube ?
Y cahota l'audio du badaud tard,
Y foudroya le logos dans cet art.
[Vérification des anagrammes.
Voir aussi ces deux autres sonnets
d'Alexandre Carret,
employant les mêmes lettres que ci-dessus.]
P.S. du 17/07/22 : nouvelle traduction française du double sonnet anagrammatique de Pedro Poitevin & Anthony Etherin, cherchant à être aussi fidèle que possible aux originaux espagnol & anglais. Le titre résume successivement les quatre strophes.
Ô duo amoché,
ô sofa,
ô âme,
ô aède !
Durant des mois, on alla transposant
Tout meuble, oeuvrant à l'idéale place.
L'ordre obtenu n'y fut guère apaisant
Car tu voyais mainte tache tenace.
Mon bon sofa rangeons en lieu plaisant,
Et du doyen laissons la table basse
Choir à côté du tapis fort grisant.
Il faut calmer chaque frayeur qui passe.
Lors de la vie autant nous essayons
De choyer l'âme où le joyau titube.
Qu'y coud ma règle ? Oh toujours balayons !
L'ellipsoïde a-t-il un air de cube ?
Ce débogage accommodera tard
L'ode d'aède à combo de cet art.
[Vérification des six sonnets anagrammatiques]
El Protehog
[Ce sonnet de quinze heptasyllabes est en fait
un hog
— plus précisément un tog
à quatre coupures possibles :
3+3+7 + 3+3 + 7+3 + 3+7+3+3+7+3+3+7+3+3 + 7+3+3+7+3+3]
Je suis triste pessimiste Prince à l'aboli manoir Et luthiste veuf j'assiste À ma chute en un trou noir Altruïste défunt myste Rends-moi l'italien terroir Où le ciste coexiste Avec la rose en miroir Ton étreinte m'offre teinte Rouge ô nixe de Biron Dans l'enceinte dont l'eau suinte J'ai su franchir l'Achéron Car sans crainte mon chant tinte Passant d'envoûtant juron À la plainte de la sainte |
Je suis triste Pessimiste Prince à l'aboli manoir Et luthiste Veuf j'assiste À ma chute en un trou noir Altruïste Défunt myste Rends-moi l'italien terroir Où le ciste Coexiste Avec la rose en miroir Ton étreinte M'offre teinte Rouge ô nixe de Biron Dans l'enceinte Dont l'eau suinte J'ai su franchir l'Achéron Car sans crainte Mon chant tinte Passant d'envoûtant juron À la plainte De la sainte |
[Voir aussi ces autres hogs nervaliens ou aux rythmes voisins]
P.S. du 22/07/22 :
sélénet qui
est en fait un tog
à deux coupures possibles :
5+5+2+2+5 + 2+2 + 5+2+2+5
Dans la grise brume Amical marmot Exhume ta plume Pour écrire un mot Chandelle mortelle En ce triste lieu Constelle ma stèle Pour l'amour de Dieu |
Dans la grise brume Amical marmot Exhume Ta plume Pour écrire un mot Chandelle Mortelle En ce triste lieu Constelle Ma stèle Pour l'amour de Dieu |
P.P.S. du 24/07/22 :
ballade balladante au schéma de rimes traditionnel
(trois fois AbAbbCC plus un envoi bbCC), qui est
en fait un hog
— plus précisément un tog
à six coupures possibles :
3+3+7 + 3+3 + 7+7+3+3+3+3+7+7 + 3+3+7+7 + 3+3+3+3+7+7+3+3+7+7+3+3 + 3+3 + 7+7+3+3+3+3
Comme dans ce précédent hog
irréductible (qui n'avait rien à voir
avec une ballade), il y a 37 vers de 3 ou 7
syllabes en totalisant 163.
Le poète qui souhaite Séduire est un parangon De fluette girouette. Dans l'extravagant wagon De vers de ce boulégon, Volatile versatile, S'y distille l'inutile. Planant comme une mouette, Il repère en un lagon La bluette désuète Qu'a sublimée Aragon Et tente un analogon. Mais cette île semble hostile : S'y distille l'inutile. Au cours d'une pirouette, En crachant tel un dragon, Sa luette rompt, muette. Hélas ! quand on zigzague, on Change sirène en dugon Et mutile maint dactyle : S'y distille l'inutile. Prince, ne sois pas bougon, Mais arrête ce jargon ! Dans tout style qui rutile, S'y distille l'inutile. |
Le poète Qui souhaite Séduire est un parangon De fluette Girouette. Dans l'extravagant wagon De vers de ce boulégon, Volatile Versatile, S'y distille L'inutile. Planant comme une mouette, Il repère en un lagon La bluette Désuète Qu'a sublimée Aragon Et tente un analogon. Mais cette île Semble hostile : S'y distille L'inutile. Au cours d'une pirouette, En crachant tel un dragon, Sa luette Rompt, muette. Hélas ! quand on zigzague, on Change sirène en dugon Et mutile Maint dactyle : S'y distille L'inutile. Prince, ne sois pas bougon, Mais arrête ce jargon ! Dans tout style Qui rutile, S'y distille L'inutile. |
Rimes
à signes extérieurs de richesse
Rimes polysyllabiques dans lesquelles manque volontairement
une syllabe (généralement la pénultième) afin de paraître plus
pauvres. Cette contrainte date de mon adolescence, vers la fin
des années 1970, mais je viens seulement de la décrire sur
la liste oulipo, donc ça m'a donné envie de
la tester sur notre souffre-douleur
favori. Voici également une déformation d'un célèbre distique
holorime de Charles Cros, proposée pour illustrer la contrainte :
Dans ces meubles laqués, ces rideaux et dais amples,
Danse, aime, bleu laquais, ris d'oser des exemples.
El Pobrecito
(Le Pauvret)
Je suis le sombre inconsolé,
Le veuf au deux-mâts mêlant lie :
Mon asile sombre, insolé,
Au fond de ma Mélancolie.
Acolyte en Gironde, ailé,
Rends-moi ta province abolie
Qu'élit tant giron désolé
Quand le ciste âpre au vin s'allie.
Il paraîtra Vercel, Aron,
Si ne l'a ménagé la reine.
En lamé nageait la sirène...
Et j'ai traversé l'Achéron,
Filant sous vihuela d'Orphée
Le silence où vis huer la fée.
Gérard Duval
Limericks rythmés
[Alain Chevrier vient de publier un
livre consacré aux limericks, forme fixe
humoristique à l'origine en anglais. Il s'agit de cinq vers
rimant selon le schéma AABBA, ceux en A devant contenir trois
accents toniques et ceux en B deux accents toniques. Son
acclimatation au français a généralement fait perdre ce rythme.
Ci-dessous, j'expérimente son respect, en faisant suivre les
syllabes accentuées par plusieurs espaces pour aider les lecteurs
francophones à retrouver la scansion anglaise. J'ai
volontairement essayé plusieurs mètres, d'abord 9/9/6/6/9 comme
George du Maurier, chaque groupe de trois
syllabes étant un anapeste ⏑⏑—, puis un
micro-limerick 3/3/2/2/3 ne contenant que des temps forts, un
exemple avec des alexandrins romantiques 12/12/8/8/12, chaque
groupe de quatre syllabes étant accentué sur la
quatrième ⏑⏑⏑—, et enfin la variante 8/8/5/5/8,
qui revient à reprendre le premier schéma 9/9/6/6/9 mais en
rendant muette la première syllabe de chaque vers :
⏑— ⏑⏑— ⏑⏑— / ⏑— ⏑⏑— ⏑⏑— / ⏑— ⏑⏑— / ⏑— ⏑⏑— /
⏑— ⏑⏑— ⏑⏑—. Le premier limerick est un hommage au livre
d'Alain Chevrier, le second est holorime, le troisième cite un célèbre
trimètre romantique de
Victor Hugo,
en faisant allusion au fait que notre ami
Patrick Flandrin est président de
l'Académie des Sciences, et le dernier propose
une variante de contrepèterie où deux phonèmes consonantiques
sont intervertis mais en maintenant leur voisement ou non en
leurs positions initiales.]
Un auteur appelé Chevrier,
En puissant littéraire ouvrier,
A rimé des poèmes
Grivois mais tu les aimes
Car ils font notre esprit se vriller.
*
L'Éternel voit tout
Naître, ô Dieux !
N'être odieux...
Qu'antique
Cantique
N'ait trop d'yeux !
Variante
avec violation de la liaison supposée :
L'être odieux, / Laid, trop d'yeux / Salissent / Sa lisse / Lettre, ô Dieux !
*
Un immortel — longtemps avant Patrick Flandrin,
Pour éviter trop de salam - alecs sans drain,
A déclaré qu'à l'hémistiche
Toute césure est un postiche :
J'ai disloqué ce grand niais d'alexandrin.
*
À Nîme, en station Pont du Gard,
S'enivre un mari, l'oeil hagard :
Cocu chef de gare
Au sort qui s'égare,
Hélas devenu con du bar !